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Plus-values des particuliers

Bénéfice de l’abattement renforcé : pas d’obligation de rachat, pas de garantie en capital

La conclusion d’une promesse unilatérale de vente, concomitamment à l'acquisition de ses actions par un cédant, ne traduit pas l'octroi par la société au contribuable d'une garantie en capital, dès lors que cette promesse unilatérale de vente ne comporte aucune obligation pour son bénéficiaire de l'exercer, de sorte que le contribuable n'était pas assuré de vendre, en toute hypothèse, ses titres pour un prix égal à celui auquel il les avait acquis.

Les contribuables qui cèdent des titres de PME soumises à l’IS et exerçant une activité opérationnelle peuvent bénéficier d’un abattement pour durée de détention renforcé lorsque (CGI art. 150-0 D, I quater) :

-la société dont les titres sont cédés avait moins de 10 ans à la date de souscription ou d’acquisition des titres cédés ;

-et qu’elle n’accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de la souscription ou de la détention de ses titres (le respect de cette condition s'appréciant de manière continue pendant toute la durée de cette détention).

L’affaire soumise au Conseil d’État portait sur l’appréciation de cette dernière condition.

En 2013, un contribuable a cédé 13 700 actions de la société de gestion de portefeuilles dont il était salarié, acquises en 2008, dégageant une plus-value de 485 806 € pour laquelle il a demandé le bénéfice de l’abattement renforcé d’un montant de 65 % (titres détenus depuis au moins 4 ans et moins de 8 ans). Estimant non remplie la condition tenant à l’absence de garantie en capital par la société dont les titres sont cédés à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leur souscription pour le bénéfice de cet abattement, l’administration l’a partiellement remis en cause pour 7 200 actions cédées.

Le tribunal administratif ayant donné raison à l’administration, le contribuable a fait appel.

Il ressort de l’instruction que, concomitamment à l'acquisition de ses actions en 2008, le contribuable avait signé une promesse unilatérale de cession de ses actions au bénéfice du directeur général. Aux termes de cette promesse de vente, le contribuable s'était engagé, d'une part, à céder ses actions au directeur général, si ce dernier lui en faisait la demande et, d'autre part, à ne pas se défaire de ses actions au profit d'un tiers autre que ce dernier ou une personne désignée par lui jusqu'au terme de la promesse, lequel interviendrait à la fin du sixième mois suivant la cessation de ses fonctions de salarié au sein de la société ou, au plus tard, à une date déterminée, le prix de cession ne pouvant, dans cette hypothèse, être inférieur au prix d'acquisition des actions par le contribuable.

L’administration et les juges de première instance ont considéré que la conclusion de cette promesse de vente traduisait l’octroi par la société au contribuable d’une garantie en capital faisant échec au bénéfice de l’abattement retraite.

Sur appel du contribuable, la cour administrative d’appel (CAA Versailles 18 novembre 2021, n° 19VE01636) a considéré qu’en l’absence de toute obligation pour le DG de lever une telle promesse, elle ne saurait être regardée, en elle-même, comme une garantie en capital au sens des dispositions précitées pour le bénéfice de l’abattement renforcé.

Sur pourvoi du ministre de l’économie, des finances et de la relance, le Conseil d’État confirme l’analyse des juges d’appel.

Cette promesse unilatérale de vente ne comportant aucune obligation pour le DG de l’exercer, de sorte que le contribuable n’était pas assuré de vendre, en toute hypothèse, ses titres pour un prix égal à celui auquel il les avais acquis, elle ne pouvait être assimilée à une garantie en capital donnée par la société au cédant faisant échec au bénéfice de l’abattement renforcé.

Rendue au sujet de l'abattement applicable aux cessions réalisées avant 2018, soumises de plein droit au barème progressif de l'IR, cette solution est transposable à l'abattement applicable aux cessions réalisées depuis 2018 en cas d’option pour le barème de l’IR, sous réserve dans ce dernier cas, que les titres aient été acquis ou souscrits avant 2018.

Pour aller plus loin :

« Titres de sociétés et instruments financiers : quelle fiscalité ? », RF 2021-5, § 4055

CE 5 juillet 2022, n° 460047

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